François Baril Pelletier : Dans la lumière de la traverse : Poésie : Les Éditions L’Interligne : 2022 : 68 pages

Depuis que je tiens un blogue de littérature, il est arrivé à plusieurs reprises que des auteurs connus ou inconnus, à tout le moins inconnus de moi, me contactent afin de me faire parvenir leur tout dernier ouvrage. Je réponds invariablement à chacun que je suis passablement occupé, ce qui est vrai, et que, par conséquent, il est possible que je ne donne pas suite à leur envoi. Je fais savoir à l’auteur ou l’autrice que je n’écris au sujet d’un livre qu’à la condition d’être parvenu à « vraiment » le lire. On aura compris qu’il faut que le livre me parle ou qu’à cette fin je lui laisse la chance de me parler. Qu’un livre soit ou non excellent, il n’est pas dit que l’on est en mesure d’en faire la recension de manière éclairée.

Cela dit, j’aurais été fort mal venu d’éconduire François Baril Pelletier. Sa requête était toute simple et ses attentes, il me le confessa, n’étaient pas très élevées. Il me laissait entièrement libre de parler ou non de son recueil. Or, je viens tout juste de le recevoir et de le parcourir — parcourir n’est pas le bon mot. À dire vrai, je l’ai lu immédiatement, puis, je l’ai relu et encore relu. Vraiment, vu la qualité de cette œuvre, il eût été regrettable que ce livre échappât à ma connaissance.

Voilà une bien longue entrée en matière. Mais bien qu’elle soit longue, je juge opportun de la prolonger.

Je reviens donc un instant sur la distinction entre auteurs connus et auteurs inconnus. On a beau dire, si certains auteurs connus ne méritent pas vraiment de l’être, il est des auteurs inconnus dont l’existence devrait franchement être portée à l’attention de tout véritable amateur de littérature. On réserve le titre de méconnus aux écrivains dont l’œuvre, bien que méritoire, passe relativement inaperçue. François Baril Pelletier n’est ni un auteur inconnu ni un auteur méconnu. Si j’ignorais son existence, seule mon ignorance était en cause. Cela dit, c’est sans a priori que j’ai d’abord ouvert Dans la lumière de la traverse, ou plutôt presque sans. En fait, je croyais que j’y trouverais un recueil plutôt convenu, probablement moyen, puisque, je le rappelle, aucune rumeur médiatique n’avait à ce jour fait parvenir jusqu’à moi le nom de cet auteur. Ce silence me paraissait révélateur d’une certaine indigence. Mais ce silence était autrement éloquent. Il disait le contraire de ce que j’avais d’abord pensé. Les poètes les plus discrets, de toute la cuvée sont souvent les plus délicieux. Cela est vrai dans le cas de Baril Pelletier.

En effet, dès la première lecture, la pertinence de son ouvrage m’a paru franchement évidente. Si bien que c’est moins pour mieux comprendre ce que je lisais que je me suis mis à le relire, que pour m’imprégner davantage encore de cette substance dont je percevais la richesse, bien que seule sa beauté m’en effleurât d’abord. Il existe en poésie un indéniable plaisir de lecture ; de nombreux aspects d’un texte le suscitent, dont assurément la qualité de l’écriture. Celle-ci est un facteur déterminant du plaisir que l’on éprouve en lisant de la poésie, est un des éléments conducteurs qui du texte à la lecture engendrent dans notre perception un contentement qui, cela va de soi, est en grande partie de nature esthétique, mais dont le gain est, dans le meilleur des cas, principalement procuré par la prégnance du texte qui, outrepassant les limites de l’art, ajoute à la lecture une plus-value de sens, comme si justement le poème était alors porteur de cela qui chez le lecteur déclenchera un processus qui peut-être en sera un d’élévation spirituelle.

Je l’affirme sans ambages, ce livre est excellent. Sa simplicité opère à merveille. Avec un sens remarquable de la mesure, de la retenue, avec un doigté minutieux, un sens délicat de la musique, du phrasé, François Baril Pelletier produit un art sans prétention. Ses poèmes sont tous brefs. Les images apparaissent çà et là avec sobriété. Elles évoquent. Mais qui dit simplicité ne dit pas simplisme ou insipidité. Une certaine subtilité se rencontre même à travers une forme simple. Le poète joue de la disposition des vers, de leur enchaînement qui, en raison d’une absence de ponctuation à peu près généralisée, offre des parcours aléatoires, divers, que les lecteurs empruntent à leur gré, privilégiant tel raccordement des vers entre eux plutôt que tel autre. Cela ajoute à la polysémie d’un ouvrage dont la trajectoire est cependant univoque. En effet, le poète dans ce recueil suit une voie et celle-ci est celle d’une ascension. Il parle d’une « montée ». Il se situe dans l’ouverture et la Voie lactée l’inspire grandement. C’est à plus haut que soi qu’il aspire, tourné vers un certain avenir, mais habitant pleinement le temps présent.

Là-bas
Loin dans les ciels
D’un futur
D’un passé

Du présent
Éternellement
À réinventer

« Une étoile [scintille] / Dans le sein » du poète, « comme une prière / Au chemin de la poitrine ». C’est dans la blancheur, j’imagine celle du cœur apparié à la lumière de l’étoile, que le poète chemine « Jusqu’à la grande lancée ». Il parle de « Ces routes montrées / Par les doigts tendus / Vers le haut des cimes ».Le préfacier du recueil a bien raison de souligner qu’il y a chez le poète une « saisie du réel ». Cette saisie a trait, écrit-il, à « l’immensité invisible « du réel (les vers que je viens de citer vont dans ce sens), mais elle s’applique également à « sa substance visible ». De ce monde visible, admirable, une section de l’ouvrage témoigne de splendide manière. Dans « Les jardins de la terre et du ciel », cette « substance visible » coule comme le vin qui vient de la vigne. Les plantes et les forêts, les sentiers et la Voie lactée la manifestent. Cette réalité toute physique du monde réel me paraît pousser le poète à poursuivre sa quête, à aller de l’avant.

Et l’on marche
Le cœur
Dans la poitrine
Le ciel dans la serviette
Et dans son baluchon
Le miracle de marcher :
Un pas devant l’autre
Du chemin aux marées
En passant par la rivière
Transportée par l’être

On s’étonnera peut-être de voir ici une rivière transportée par l’être, mais s’étonner avec François Baril Pelletier est chose fort agréable. On aime déambuler au sein de ses poèmes « Dans l’éternelle / Errance / Volupté / de l’Être / Qui jusqu’au delta / Ruisselle ». On aime que dans son recueil il soit question de musique, de celle que fait entendre le criquet, des « voix / Éperdues / Sur le bord du ruisseau / Trop seules / Pour avoir pu / Chanter dans d’autres oratoires ».

Si le chant en vient à culminer « Jusqu’à la gloire / De la joie », les horreurs du monde n’en sont pas pour autant oblitérées. Le poète a beau rêver d’un monde meilleur et nous, encore une fois, nous avons beau lui emboîter le pas, malgré la musique, dans ces poèmes se font entendre les tumultes : « Des désastres plus grands / Que la terre en soi ».

Les deux derniers poèmes de son recueil sont magnifiques. Une cime, du moins mentalement, est atteinte, un trésor à force de vivre a été découvert. Le poète entend le léguer « À la nuée / Vivante, aux ors libres / Aux enfants de demain ».

C’est sur ces mots que se termine le recueil. Il s’était ouvert avec une préface dont il convient maintenant de mentionner la pertinence. Elle est signée Michel Muir. On se souviendra que cet écrivain avait au siècle dernier quelque peu « effrayé » la chronique. Son pamphlet intitulé Poètes ou imposteurs lui avait valu quelques inimitiés. Sans mentionner qui que ce soit, il administre ici quelques bastonnades. Mais celles-ci ont pour but de mettre en valeur le poète qu’il présente afin de mettre son travail à part « des pauvres modes insanes de notre époque ». Il a raison, François Baril Pelletier a écrit un livre dont la facture diffère grandement de ce qu’on lit habituellement. Pour ma part, j’y découvre ce que Fénelon appelait jadis « un sublime familier ».

Muir signe une préface qui a le mérite de dire l’essentiel. Elle encouragera le poète à poursuivre sur une voie que Muir dit nouvelle : « à la différence des précédents recueils, qui se singularisaient par l’abondance des métaphores et des épithètes, celui-ci se distingue par une évidente sobriété, une simplicité dans le dire qui atteste une meilleure saisie du réel, dans sa substance visible et dans son immensité invisible. Nous sentons que le poète cherche davantage à cerner le vif, à tailler son poème dans la matière subtile du vivant. »

Auteur : Daniel Guénette

Né le 21 mai 1952, Daniel Guénette est originaire de Montréal. Il a vécu la majeure partie de son existence dans l’arrondissement de Saint-Laurent. Après des études en lettres à l’Université de Montréal, où il obtient un diplôme de maîtrise en création littéraire, il enseigne la littérature au cégep de Granby. En 2011, il prend sa retraite après 34 années d’enseignement. À l’aube de la soixantaine, il renoue avec l’écriture qu’il avait cessé de pratiquer durant près de vingt ans. Il publie chez Triptyque deux recueils de poésie, Traité de l’Incertain en 2013 et Carmen quadratum en 2016, ainsi qu’un récit, L’École des Chiens, en 2015. Dans son œuvre antérieure alternaient ouvrages de poésie (3 titres au Noroît, 2 chez Triptyque) et productions romanesques (3 titres chez Triptyque). Ces ouvrages furent publiés entre 1985 et 1996. L’ensemble fut bien reçu par la critique. À l’occasion du vingtième anniversaire des éditions Triptyque, feu Réginald Martel écrivait : « Et on soupçonne que bien des éditeurs seraient ravis d’inscrire à leur catalogue, parmi quelques auteurs de Triptyque, le nom d’un Daniel Guénette, par exemple. » J. Desraspes a enchanté Jean-Roch Boivin : « Ce roman est un délicieux apéritif, robuste et délicat, son auteur un écrivain de talent et de grands moyens. » Réginald Martel parle d’un roman « qu’on dévore sans reprendre son souffle » ; il salue également la parution des romans qui suivent, se montrant surtout favorable à L’écharpe d’Iris. Pierre Salducci écrit dans Le Devoir un article élogieux sur ce roman : « L’écharpe d’Iris est une réussite, une petite musique qui nous parle de la nature humaine et qu’on n’arrive pas à oublier. Un roman magnifique, un vrai. Pas un phénomène de mode. Pas un produit branché et périssable. Mais de la littérature. Tout simplement. » L’École des Chiens, qui en 2015 marque le retour de l’auteur au récit, a été commentée par divers blogueurs, dont le poète Jacques Gauthier : « Ce beau récit du poète Daniel Guénette évoque, avec pudeur et humilité, les onze années vécues auprès de Max qu’il a dû faire euthanasier à cause d’un cancer. Ils sont rares de tels livres qui traitent si tendrement de la relation entre un homme et son animal de compagnie. Ça parle de vie et de mort, d’attachement et d’amitié, d’enfance et de solitude. » Pour sa part, Topinambulle écrit : « Dans ce très beau récit, un homme apprivoise doucement le deuil de son chien. À la manière de Rousseau, Daniel Guénette nous invite à le suivre dans ses promenades, dans les méandres de ses souvenirs, où l'évocation de l'ami fidèle nous servira de guide. ». Dominic Tardif, dans Le Devoir, 4 juillet 2015 a rendu compte chaleureusement de L’école des chiens. Il a souligné qu’avec ce récit, l’auteur avait produit « de la vraie littérature » : « Plus qu’un livre sur un maître et son animal, L’école des chiens célèbre le pouvoir de l’écriture qui, chez Daniel Guénette, n’aspire pas à remplacer l’en allé, mais bien à en continuer la vie. » Recommandé avec enthousiasme à ses téléspectateurs, L’école des chiens a fait l’objet d’un échange de cadeaux à l’émission LIRE présentée sur ARTV. À partir de 1975, l’auteur a collaboré à diverses revues de littérature à titre de poète et de critique. On a pu lire ses recensions dans la revue Mœbius. Pour l’une d’elles, l’auteur a été finaliste au Prix d’excellence de la SODEP 2016, dans la catégorie Texte d’opinion critique sur une œuvre littéraire ou artistique. Plus récemment, l’auteur a publié deux nouveaux titres en poésie, Varia au Noroît en 2018 et, à l’hiver 2023, La châtaigneraie aux Éditions de la Grenouillère. Pour ce recueil, le poète a été finaliste au Prix d’excellence du webmagazine La Métropole. Dans la recension que réserve à cet ouvrage la revue LQ, le critique Antoine Boisclair écrit: « Ce recueil émouvant, très maîtrisé du point de vue formel, témoigne d’un savoir-faire indéniable. » Le critique et poète français Pierre Perrin écrit dans sa revue trimestrielle de littérature, la revue française « Possibles », ne pas confondre avec la revue québécoise du même nom : « Daniel Guénette a le vers sûr, souvent proche de l’alexandrin, parfois très bref. Il sait restituer une vie, avec sa foudre, ses éclairs, et les moments de calme, voire de communion. La Châtaigneraie constitue un beau recueil presque filial. » Pour sa part, dans Le Ou'tam’si magazine, Nathasha Pemba déclare que « La châtaigneraie est un recueil de poésie qui a l’allure d’un hommage, d’un renouvellement du contrat amical. C’est une poésie ontologique qui va au fond des choses pour faire émerger l’être. Daniel Guénette une fois plus confirme qu’il est poète, le poète de l’amitié, le poète de l’altérité, le poète de l’éternité. » Outre ces recueils de poésie, l’auteur fait paraître quelques nouveaux romans. De Miron, Breton et le mythomane, paru en 2017 à La Grenouillère, Dominic Tardif écrit dans Le Devoir : « Chronique des glorioles imaginaires d’un grand taquin aimant (se) conter des histoires et fabuler une légendaire vie d’aventures, Miron, Breton et le mythomane est le carton d’invitation d’une fête organisée en l’honneur du mensonge auquel s’abreuve n’importe quelle forme de littérature digne de ce nom. » Pour sa part, Dédé blanc-bec reçoit dans Nuit Blanche un commentaire signé Gaétan Bélanger : « Le ton poétique empreint d’humour et de nostalgie adopté par l’auteur rend extrêmement agréable la lecture de ce roman émouvant. Il faut préciser que, tout d’abord, il est un peu déroutant de suivre les bonds fréquents de la narration dans le temps. Plus que de simples digressions, elles donnent parfois l’impression que l’auteur saute du coq à l’âne pour revenir aux mêmes événements, observés sous un angle différent. Mais on s’habitue vite à cette manière ou à ce style et on l’apprécie pour son originalité. Voilà donc un roman au texte minutieusement poli et se démarquant par sa qualité et son audace. » Vierge folle est le dernier roman de l’auteur. La recension parue dans Culture Hebdo se termine avec ces mots : « Nous vous laissons le soin de découvrir la conclusion. Excellent, est un euphémisme. On a adoré. » Ce roman, sans doute le meilleur de l’auteur, s’il a suscité l’enthousiasme de ses lecteurs n’a guère fait l’objet de recensions sérieuses. Pour des recensions sérieuses, il aura fallu attendre l’hiver 2023. Au billet d’Antoine Boisclair portant sur La châtaigneraie, se sera ajoutée dans Le Devoir une chronique de Louis Cornellier consacrée non pas à un roman ou un recueil, mais à un essai. Le journaliste y salue d’abord le travail entrepris par l’écrivain sur son blogue : « Fin lecteur de poésie, l’écrivain s’y impose comme un critique raffiné, érudit et amical dont le style, limpide et élégant, s’apparente à celui de la conversation relevée. Ces qualités en font une rareté dans le paysage littéraire québécois. » Puis, il rend compte de l’essai : « Dans Le complexe d’Orphée (Nota bene, 2023, 186 pages), l’écrivain se fait plus essayiste que critique en proposant « une manière de promenade » dans laquelle il tente « de saisir la nature de la poésie ». Fidèle à son approche modeste et exploratoire, il déambule en compagnie des poètes et penseurs qu’il aime afin de délimiter son objet, tout en cultivant le souci de ne pas l’enfermer. » Il conclut sa chronique en ces termes : « Partisan des « poèmes limpides » qui disent de « simples vérités », Guénette trouve dans la poésie un antidote « à l’endormissement de [ses] facultés » ou, comme l’écrit Valéry, un discours « chargé de plus de sens, et mêlé de plus de musique, que le langage ordinaire n’en porte et n’en peut porter ». Fénelon aurait aimé ce livre admirable. » La conclusion de l’article d’Antoine Boisclair portant sur La châtaigneraie était elle aussi plutôt réjouissante : « Romancier accompli (son dernier récit, Vierge folle, est paru en 2021 aux éditions de La Grenouillère), critique littéraire important (son blogue, intitulé Dédé blanc-bec, offre des comptes rendus très étoffés sur des publications québécoises), Daniel Guénette est aussi un poète qui mérite toute notre attention. »

7 réflexions sur « François Baril Pelletier : Dans la lumière de la traverse : Poésie : Les Éditions L’Interligne : 2022 : 68 pages »

  1. Ah! un poète qui, Comme Bobin, écrit avec son coeur. La rivière transportée par l’être, c’est à rapprocher d’Emily Dickinson quand elle écrit à son ami Elizabeth Holland: And I hear today for the first time the river in the tree. L’arbre c’est elle, la rivière c’est le flot de la conscience
    qui monte jusqu’au ciel des branches. C’est une expérience intérieure que j’ai vécue 2 fois.

    Merci Daniel pour cette découverte.

    François

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  2. Combien touchante, authentique et palpitante cette description de ton heureuse découverte de cette oeuvre de Baril Pelletier.
    Quelle belle mise en valeur des poèmes de cet «inconnu»!
    Fascinant de voir ton processus pour faire ressortir son talent.
    C’est beau, mystérieux et admirable tout ça.
    Combien d’aspirants aimeraient vivre cette chance!

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    1. Inconnu, tout cela est relatif. Je ne le connaissais pas, mais, ce poète, qui est aussi un peintre, a quand même fait assez de bruit : ce n’est pas parce que je n’avais pas entendu ce qu’on disait à son sujet qu’on peut dire qu’il est inconnu.
      J’ai trouvé les informations suivantes : « Peintre et poète, François Baril Pelletier a publié plusieurs recueils de poésie, dont Apocryphes du cœur et Terres et traces de l’immuabilité aux Éditions David. Aux Éditions L’Interligne, il est l’auteur du recueil Les trésors tamisés, finaliste au Prix littéraire du Gouverneur général en 2015. »
      Entre toi et moi, finaliste au Prix du Gouverneur général, ce n’est pas rien.
      Cher Laurent, je te remercie pour ton beau commentaire.

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